Poésie·Réflexions

Les larmes de Rachel

L’avez-vous remarqué ? la période de Noël, qui s’annonce toute de liesses et d’espérances de bonheur, est presque chaque année profondément troublée par quelque calamité soudaine, par un deuil inattendu… La raison répond que des malheurs, il en pleut sans arrêt ici-bas, et que si on les remarque davantage autour de Noël, c’est simplement par contraste avec la joie que notre calendrier attache à la saison…

Peut-être… et cependant cette réalité psychologique nous renvoie au premier Noël, qui ne fut pas non plus exempt de larmes, versées au milieu des chants d’allégresse des anges, et de quelques purs en Israël, célébrant la naissance du Sauveur.

Monstre d’égoïsme et de cruauté, le roi Hérode, jaloux de son pouvoir, envoya tuer tous les petits garçons de moins de deux ans dans les environs de Bethléem, après avoir appris par la bouche des Mages que l’étoile annonçant la venue du Messie brillait depuis cette durée. Tous les petits garçons, c’est-à-dire d’après les historiens qui ont étudié la statistique, entre quinze et vingt. Mais qu’importe le nombre ? un seul meurtre de ces innocents, reste un drame accablant.

La théologie peut devenir un agréable passe-temps, pour discuter entre amis et s’échauffer intellectuellement dans un salon, mais déconnectée de la réalité, elle n’a pas le pouvoir de consoler les malheureux. Le Fils de Dieu n’a pas voulu s’incarner dans un monde d’abstractions et de syllogismes, mais il est venu dans notre vraie vallée de larmes, où le mal et le malheur sont de réelles puissances, libres de s’exercer dans une large mesure.

Dieu ne savait-il pas que les enfants de Bethléem seraient tués ? oui il le savait, puisqu’il dépêche un ange pour avertir Joseph de fuir avec sa famille. Du reste, dans le cours de l’histoire humaine, ce ne sont pas vingt innocents bébés qui périssent sans explication, mais des milliers, des millions… et qui aurait le courage d’évoquer devant des parents effondrés, ce mot théologique sans compassion, derrière lequel nous cachons notre impuissance à comprendre : le décret de Dieu ? Non, Dieu ne décrète pas froidement la souffrance des hommes : lui-même a donné son propre Fils, qui a souffert une mort atroce et ignominieuse, pour nous.

Le sonnet qui suit a été écrit par Alfred de Baillet, vraisemblablement suite à un drame familial personnel. Ce deuil, que l’on ne peut pas même relier directement à la venue de Jésus, reste tout aussi douloureux et inexplicable que ceux de Bethléem ; et comme eux, il ne se résoudra que dans ce dernier mot de l’Histoire et de l’Écriture, que l’Esprit Saint laisse à ceux qui se tournent avec foi vers le Seigneur et Sauveur Jésus-Christ :

Il essuiera toute larme de leurs yeux, et la mort ne sera plus, et il n’y aura plus ni deuil, ni cri, ni douleur, car les premières choses ont disparu.

Elle ne veut pas être consolée,
parce qu’ils ne sont plus… »

(Matth. 2.18)
🎄

Joyeux et tout ravis des cadeaux qu’il leur donne, Trois enfants entouraient un arbre de Noël.Ils semblaient oublier qu’à la fin de l’automneLeur petit frère avait pris son vol vers le ciel.

La mère souriait pour n’attrister personne, Malgré l’âpre douleur de son cœur maternel  ; Mais, quand partout la joie autour d’elle résonne, Elle pense à celui qui manque à son appel.

Et fuyant tout ce bruit dont les éclats l’agacent, Car les chagrins d’enfants sont des ombres qui passent, Elle court vers le lit du cher petit absent.

Là, devant l’oreiller de la couche déserte, Elle tombe à genoux, et, par la porte ouverte, Le père entend la mère appeler son enfant.

Alfred de Baillet
(1823-1889)
🎄

Le massacre des innocents, tableau de Vincent Malo l’ancien (1585-1649)

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